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Pourquoi une reconversion en maraîcher bio ?

Comment ça j’ai pris l’ascenseur social à l’envers ? Nombreux sont ceux qui me demandent pourquoi j’en suis arrivé là. Les raisons qui m’ont mené vers cette voie sont très diverses. Il est temps d’étaler ce cheminement qui m’a poussé à cultiver le sol et nourrir les gens. Et j’espère bien vous surprendre, car la question est bien plus profonde et sociétale qu’il n’y paraît !

Pas du tout issu du milieu agricole, mais tout de même très attaché au milieu champêtre, ma seule expérience, jusqu’à 25 ans, en terme d’agriculture était une petite saison de vendange verte dans l’entre-deux mers, et le potager de mon grand-père. Rien de transcendant, rien de prédestiné, rien de très intéressant professionnellement jusque là. Pendant dix ans, j’ai été technico-commercial chez un grossiste, je m’occupais principalement du chauffage, de la clim et des énergies renouvelables. Légèrement raccord avec ma formation originelle : B.T.S. de mesure physique et licence professionnelle dans la gestion des énergies.

Car l’air du temps était aux économies d’énergies il y’a déjà 15 ans. Sans être un écolo forcené, je me plaisais dans l’idée de faire changer d’avis un client pour qu’il préfère installer un système de chauffage moins énergivore. Même si cette partie du travail était la plus infime, et que la majorité de mon temps était passé au bureau devant un ordinateur, à faire de la logistique, de la gestion de devis, de commandes et de recherches techniques.

Un travail peu passionnant, dans un sombre bureau, avec au loin une fenêtre qui m’appelait constamment. Que faisais-je enfermé dans cette grotte ?

L’aspect Passionnel.

Alors oui ! Le métier de maraîcher nécessite obligatoirement quelques fondamentaux : il faut aimer être dehors, qu’il pleuve, qu’il vente, qu’il fasse chaud ou froid. Il faut supporter marcher dans un sol mou, se salir les habits, les mains, les ongles (il paraît même que c'est bon pour le moral). Etre debout quasiment tout le temps ou être penché, courbé, à genou. Mais avant toute chose, il faut aimer les végétaux. Il faut aimer s’en occuper, les regarder pousser, fleurir, fructifier, connaître leur noms, leur histoire, leurs maladies. Toute personne ayant son potager en est témoin, ce sont des préceptes de base !

Et ils étaient déjà au fond de moi depuis tout petit. Et ils ont jamais été tant désirés que durant 10 ans dans la grotte de mon ancien emploi.

Mais ce n’est pas suffisant pour en faire un métier, loin de là.

La suite de mon cheminement passe alors par deux personnes…

La crise énergétique.

Je n’aime pas être alarmiste. Mais je reste cependant pragmatique.

Et honnêtement, nous avons toute les raisons du monde d’être alarmiste.

On pourrait parler de crise financière, de recherche constante de croissance dans un monde fini, de réchauffement climatique, de crise de la biodiversité, de surpêche dans les océans, de guerre nucléaire, de pandémie… Mais aujourd’hui, je pense que l’effondrement de notre système actuel est dépendant d’une seule chose : notre consommation énergétique.

Appâté par ma formation initiale, il y’a quelques années je suis tombé sur la conférence de Jean-Marc Jancovici.

Je vous invite à regarder une des dernières qu’il a produite, le bonhomme est assez pédagogue, en plus d’être un expert sur le secteur des énergies.

Et ce n’est qu’à partir de ce moment là que j’ai véritablement réussi à prendre du recul sur le fonctionnement de notre civilisation depuis plus d’un siècle.

Pour essayer de résumer (maladroitement) le constat de Jean-Marc Jancovici : La découverte et l’utilisation de sources d’énergies extrêmement puissantes (principalement charbon, gaz, pétrole, puis nucléaire) nous ont permis d’abord, de remplacer les esclaves par des machines, puis nous avons ensuite bâti notre confort, notre économie, notre société, nos habitudes, nos trains de vie, notre démographie, notre politique là-dessus. Et habitués que nous sommes, puisque nous avons grandi dans ce monde, nous ne réalisons pas à quel point ces sources d’énergies sont incroyablement puissantes et devenues irremplaçables (oui oui même par du renouvelable).

Si vous pensez que l’humanité fait des efforts en termes de consommation, vous vous trompez, on a jamais brûlé autant de charbon. Si vous pensez que rouler en voiture électrique est moins consommateur d’énergie, vous vous trompez, l’électricité n’est pas une énergie primaire, il faut la fabriquer à partir d’énergie carbonée (sauf partiellement en France, par le choix du nucléaire avec ses bons et mauvais cotés). Si vous pensez pouvoir remplacer le parc énergétique actuel par de l’énergie totalement renouvelable, vous vous trompez.

Quoi qu’on vous dise, nous sommes une humanité énergivore et transformatrice. Et nos modèles de société poussent à continuer cette consommation.

Et ces ressources sont limitées.

Et un jour, tout s’effondrera.

Je crains, et je ne suis pas le seul(1), que l’on entrera dans une crise majeure pour l’humanité dans quelques dizaines d’années. Forcément ! Et cela ajouté aux autres crises évoquées en début de paragraphe…

La société étant tellement bâtie sur cet empire énergétique qu’elle ne pourra simplement pas se réformer. Nous sommes plusieurs milliards, majoritairement agglutinés dans des métropoles. Je pense que nous sommes trop nombreux pour que la transition se fasse en douceur. J’insiste sur le fait que ce n’est pas du fatalisme, mais un constat personnel.

Alors que faire ?

Continuer à pianoter sur un clavier, dans un sombre bureau ? Attendre l’effondrement ? Attendre que la société se bouge ? Attendre que les politiques bougent ?

Ou alors réfléchir à comment préparer la crise ? Etre prêt quand elle nous atteindra ? Prévenir et former le plus de monde possible ?

De quoi aurons-nous toujours besoin ? De manger, de boire, de se loger, de s’instruire, de se soigner… Tout ça semble évident et simple aujourd’hui, mais peut devenir une vraie problématique au lendemain d’une crise, ou d’un effondrement.

Notre agriculture actuelle dépend quasi-totalement du gasoil, de plastique et de l’industrie chimique. Il faut élaborer des techniques pour s’en passer dès aujourd’hui. Il faut être capable de réapprendre, puis de réinventer l’agriculture avant d’arriver au pied du mur.

Voilà pourquoi le maraichage bio à échelle humaine et locale m’a semblé être un défi avant-gardiste.

Un réseau de belles personnes.

Il y’a encore quelques années, je m’imaginais le monde agricole totalement cloisonné, à l’image de notre société. Toutes les petites structures aspirées sous l’égide de mastodonte aux capitaux appartenant à des financiers multimilliardaires. D’immenses tracteurs, d’immenses outils, d’immenses épandages de produits phytosanitaires, d’immenses champs en monoculture, une main d’œuvre composée de « travailleurs détachés »… Je ne me trompais qu’un peu.

Même si l’idée de monter une petite structure maraîchère était enivrante, j’étais convaincu que ce n’était plus viable de nos jours. Et que je ne me cantonnerai à faire du potager pour combler mes envies.

Or c’était sans compter sur la rencontre fortuite et fructueuse d’un maraîcher local, bio, à son compte, en petite surface (que je ne nommerai pas pour préserver son identité et sa modestie). J’ai ainsi découvert un petit monde sous jacent, peu connu, le principe des A.M.A.P., et surtout, SURTOUT, la viabilité de cette entreprise.

J’en avais la preuve sous les yeux, un agriculteur maraicher bio, seul, en culture diversifiée vivait de son travail sur 1,5 hectare ! Et s’en épanouissait. Comment s’en sort-il ? Grâce à la vente locale et directe.

Et plus encore, j’ai été présenté à tout un univers, un réseau de personnes, acteurs et actrices de ce milieu totalement subversif au monde de l’agriculture conventionnel. Un réseau local de gens qui se connaissent, qui s’entraident, qui sont pédagogues, volontaires, engagés, offrants et prêts à partager leur savoir et leur expérience à tous. Au sortir de mon emploi dans le monde du commerce, c’est non sans surprise que je réalisais où devait être désormais ma place.

Puis dans l’avancée du projet, j’ai continué à rencontrer d’autres amis et partenaires, à la chambre d’agriculture, à la SAFER, au CFPPA, à l'AGAP, à la confédération paysanne, des bénévoles issus du monde associatif, des gens qui donnent beaucoup d’eux pour m’aider, pour nous aider. Je pense notamment à l'espace-test où je suis hébergé actuellement, et à l'association qui le gère : porte-greffe.

La goutte qui met le feu aux poudres.

Un projet c’est beau, ça fait avancer, mais il reste toujours une étape fondamentale que l’on a tendance à sous-estimer : le courage de se lancer.

Alors dans la vie, on acquiert un certain confort, on fait des enfants, on a un crédit à la banque pour loger sa famille, on travaille et on nous ressasse constamment dans les médias qu’avoir un emploi est une chance non-négligeable. Et si mon projet rendait tout ça bancal ? Je pense que beaucoup de gens n’osent pas aller plus loin par peur de perdre des acquis, notamment lorsque des enfants sont de la partie. Et il est possible que j'en sois resté là si des épreuves de la vie ne m’avaient pas changé.

Suite à ma séparation, et à l’aboutissement de ma famille nucléaire, j’ai appris à mes dépens que je devais d’abord être heureux moi-même afin de pouvoir transmettre ce bonheur à mes enfants.

Qu’importe le confort, l’acquis, ce qui compte c’est que tout le monde s’épanouisse pour des raisons valables et ancrées dans un avenir bien plus solide.

Et ça passe forcément par ce projet qui me tenait à cœur.

Cette raison là est complètement personnelle, et il est de tout un chacun de trouver SA raison personnelle.

Et vous ? Quel est votre projet ?

(1)

http://energie-developpement.blogspot.fr/2016/05/crise-energetique-disruption-climat.html

https://teleobs.nouvelobs.com/polemique/20151208.OBS0959/oui-tout-peut-s-effondrer.html

http://biosphere.blog.lemonde.fr/2015/04/24/collapsologie-comment-tout-peut-seffondrer/

https://www.latribune.fr/economie/international/la-fin-de-notre-civilisation-pourrait-elle-arriver-en-2040-486090.html

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